mercredi 31 mars 2010

Paradis mystère

Merci Pierre... de m'avoir permis d'y poser les pieds.

Des paradis des idées, j'en ai trouvé un certain nombre à Montbrison. Mais il en existe un qui m'a particulièrement fait fourmiller. Voici quelques fragments, le puzzle complet, je le garde. Mais si vous cherchez bien, qui sait... Vous aussi, vous le trouverez.
Bon allez, va, je suis sympa, je vous donne les clefs...


Point final

Non, pas encore de la résidence... (qui cependant s'achemine doucement vers la fin). Point final d'un roman qui lambinait dans les tiroirs de ma tête depuis cinq ans. Il restait ce petit je-ne-sais-quoi pour finir le papier peint. J'ai enfin trouvé le fameux trampoline magique sur mon azerty ! Hip hip hip...

dimanche 28 mars 2010

Pause nature

Merci Matthieu et Fabienne...

L'instant t (3)

Un écrivain est, le plus clair du temps, un navigateur solitaire. Pourtant sa création se frotte sans cesse au quotidien, à la foule et à la cité, elle s’y nourrit, se teinte d'expérience vécue et d’émotions qui permettent à l’histoire de se construire dans et avec le temps affectif, suivant son propre rythme, au jour le jour. Un joyeux tressage entre un imaginaire et la vie, concrète et tangible, une vie qui se dilate ou s'émiette, s'étale ou se confettise, graines d'instants en graines d'instants - couleurs, sons, odeurs, cris et écrits - dans le récit.
La création collective en atelier se soumet à une tout autre temporalité et contraintes qui s'apparentent à celle d'un laboratoire. Dans la vie créative de l'écrivain, la plupart de ses idées évoluent en liberté dans un environnement "sauvage" (dans le cas idéal où il parvient à faire abstraction des murs formatés que lui imposent la société et ses propres inhibitions). Dans une classe, l'histoire inventée va devoir le plus souvent compter sur des idées captives, un peu comme dans une volière ; elles n'ont pas le temps de s'ébattre, de courir, de prendre le temps d’apprendre à voler et de se frotter à la vie. Tout l'enjeu de l'écrivain est donc de ruser pour que les idées se libèrent. Mais qu'on ne s'y trompe pas, il reste toujours un arrière-goût d'artifice. Il faut user de déclencheurs, provoquer l'envol, d’un cri ou d’une poignée de grains. On le sait, les animaux en captivité se reproduisent moins aisément, il en est de même pour les idées.Il existe pourtant des moments où se produisent d'étranges étincelles, où la créativité des enfants s’émancipe. En général, ces moments échappent totalement à l’écrivain qui les accompagne. Ce sont des instants aussi foudroyants qu’imprévisibles, où les enfants disposent suffisamment de confiance en eux, de désirs et « d’outils » (si tant est qu’il en existe) pour pouvoir créer sur le papier ce que leur imaginaire propose. Comme d'apprentis musiciens soudain affranchis des gammes, découvrant le plaisir de l’improvisation. Là, ils ne se préoccupent plus de construction, de syntaxe ni de rimes ; ils ont juste l’œil sur l’idée, comme un promeneur prend le temps d’observer un oiseau sur le point de voler. Ce sont des instants magiques.

vendredi 26 mars 2010

Le grand puzzle

Xibulon en kit

juste avant le grand puzzle
Un moment fort : celui de la composition des planches.

Au centrerésumé sans parole

L'une des nombreuses études pour la couverture

si vous n'avez pas compris, mettez des lunettes...
Etude pour les lunettes du Père-Noël

Au moment de la composition finale, il manque parfois des éléments dans la page, il reste des points de déséquilibre qu'il faut corriger. On les ajoute donc "sur le vif".
L'étape de la recherche est devenue un réflexe naturel. Sans même que je n'aie besoin de leur suggérer, les enfants s'emparent spontanément de feuilles et font des essais, n'hésitent plus à recommencer maintes fois, à peaufiner, jusqu'à ce qu'ils soient eux-mêmes satisfaits de leur dessin. Ils ont compris que le moindre détail compte...

Les éléments sont collés et photographiés sur fond blanc.
Le fond définitif sera inséré ensuite avec la typo

Apéro magique

Il y a parfois les séances laborieuses qui raclent des pieds, et puis il y a les séances magiques.
Les mômes ont chaussé leurs bottes de sept lieues. Deux chansons s'invitent, il est question d'olives noires et d'olives vertes, les voilà qui se lancent joyeusement dans un West Side Story version tapenade. Je sens une vraie écoute mutuelle, les idées volent et rebondissent, le rythme et la musique des mots surgissent, évidents.
- On s'est bien amusés ce matin ! me lance Corentin à la fin.
Moi aussi. Après les bretzels, les olives... prochaine séance, on attaque le porto !

mercredi 24 mars 2010

Nouvelle saison

Il y a la résidence, mais aussi les livres, qui continuent de fleurir, et les Cerises précoces qui poussent en avril. Et oui, il n'y a plus de saison.

Enfin si, il y a la saison 3 des blues Cerises, et notre quatuor de choc, qui se remet au tricot.

Changer de tête, pile ou farce, c'est le thème de la résidence.
Peut-être aurais-je dû l'intituler "Au moins une tête de plus".
Il y a des jours où on ne sait plus où donner la tête...

Soirée portes ouvertes à la résidence

Hier, présentation publique de la résidence avec les différents partenaires (CRILJ Loire, Centre Social de Montbrison, DRAC Rhône-Alpes) et acteurs des deux projets, autour d'un buffet forézien, le ton est bon enfant.
Dernière ligne droite, la plus délicate, celle du bouclage. Derniers virages, peaufinage, mise en page... Depuis plusieurs semaines, j'ai les yeux dans la pâte avec Catherine et Bertrand - les enseignants embarqués avec moi dans l'aventure - sans réel recul. Un peu l'impression de pendre là la crémaillère avant d'avoir posé les fenêtres et le papier peint, c'est toujours troublant d'ouvrir soudain la porte d'un chantier et d'y laisser entrer des visiteurs. L'équipe organisatrice de la résidence m'a accordé une si grande confiance, il y a toujours une petite pensée qui rôde, et si...
J'ai apporté un extrait du conte musical, la chanson pour recycler la cervelle, écrite par les CM1 et les 5èmes maîtrisiens, et dont Matthieu vient de m'envoyer un enregistrement. J'ai aussi le texte d'album de Xibulon, que je lis à haute voix. J'essaie de brosser un aperçu des coulisses, des fondations et des murs, du toit qu'il reste à finir, de la cheminée encore en kit. Bertrand et Catherine font part de leur ressenti.
Dans le public, parmi les visages adultes, un seul enfant, l'un des élèves du Chemin Rouge qui a participé à l'album de Xibulon. Mesure-t-il, la route qu'il a parcourue ?
Difficile, à cette table, de rendre compte du cheminement intime de la création loin des spots et des regards, des ratures et questionnements, des pages blanches et trous noirs. Combien d'impasses et idées laissées sur le bas côté, d'ardoises effacées, de crayons cassés, de bretzels avalés, de papiers découpés, de sueur séchée...
Pour le conte musical comme pour l'album, nous avons bâti un scénario, un chemin de fer ; à la manière d'un tournage de film, j'ai opté pour une avancée qui ne suivait pas forcément la chronologie de l'histoire. Je sais que j'ai été exigeante, parfois déstabilisante. C'est la présence active de Catherine et Bertrand qui a permis la continuité. De tels projets ne peuvent se tricoter sans une alchimie auteur-enseignant.
Les enfants "écrivants" ne sont pas des écrivains ; difficile de savoir ce qu'ils emportent de tout ça, mais une chose est sûre : rien ne remplace le faire. Ni le temps, nécessaire complice de la décantation, ce rythme et cette lente digestion que la résidence permet. Rien ne remplace les bottes dans la boue des mots. Ils ont vécu le surgissement, la graine d'idée, se sont trempés dans le cambouis du récit, ont eu plaisir à voir le moteur de l'imagination démarrer et l'histoire rouler. Ils se sont frottés au problème du choix, au ciselage, au rythme et aux rimes, au rapport texte/image ; leur inventivité et ténacité m'ont étonnée.
Les gens me demandent souvent : "Mais comment vous y prenez-vous, pour les faire écrire?". Euh, ben ma foi, il n'y pas de recette miracle, je fais, moi aussi. Tantôt artisane, tantôt mineur de fond. Mon métier : les ratures, les questionnements, les pages blanches et trous noirs, les idées laissées sur le bas côté, les ardoises effacées, les crayons cassés, les bretzels avalés, les papiers découpés, et la sueur qui ne sèche jamais...

Pensée

Une résidence d'auteur, c'est un lieu, un projet de création, mais ce sont aussi et surtout des personnes.
Alors, je ne veux pas attendre la fin de mon séjour pour le dire : merci à tous ces gens, si actifs et si chaleureux, à toute l'équipe du Centre Social de Montbrison, en particulier à Danièle et Claude.
Et puis, là, un grand merci à Marie-Claire et ses mille petites attentions, à Elisabeth et Charlotte, qui transforment régulièrement ma citrouille en carrosse...

vendredi 19 mars 2010

décibretzels

Message de Matthieu-le-musicien,
un MP3 des ménestrels,
les maîtrisiens ritournellent
sur les paroles des CMoingt :-)

Les cervelles bretzellent et décibellent.
C'est toujours chouette
de voir les mots enfiler leurs ailes...

mercredi 17 mars 2010

Visites

Lundi, passage de mon amie Maryvonne - l'une de mes complices blue Cerises -, pour me sortir de ma tour d'ivoire. Saut impromptu au collège Mario Meunier qui nous a accueillies lors de la précédente Fête du livre, pour saluer Dora-la-documentaliste. C'est bien la première fois que MY et moi débarquons dans un CDI sans y être invitées...
Et puis, balade rue Tupinerie et le long du Vizézy, avant de trinquer à ce grand poète du polar, Pascal Garnier, qui vient de s'envoler. Une terrasse, des souvenirs effilochés en tête-à-tête, place de la Mairie, devant une affiche d'Albert Camus.


Mardi
, plouf, je tombe dans un puits d'Histoire.
Puits devant l'entrée du centre musical,
ancien couvent des Visitandines

Non, pas cette histoire-ci...
rue du Marché
Celle-ci :
La tour de la Barrière.
Pur moment de plaisir d'écrivain, la ville main dans la main, avec un historien.
13h30, rendez-vous avec Claude Latta, pour arpenter le temps et les méandres de Montbrison. La lumière et le printemps sont enfin de sortie, j'attrape mon carnet et mon appareil photo, et le voilà qui m'embarque sur le Grand Chemin du Forez.
La ville compte de nombreux anciens couvents, Ursulines, Visitandines, Oratoriens, devenus prisons, hospices, école normale. Aujourd'hui, ils abritent qui un collège, qui une maison de retraite, un centre musical, la sous-préfecture...

Petit cours de géologie depuis la butte basaltique où s'élevait le Château des Comtes du Forez et un calvaire que l'on découvre nu (Jésus et ses brigands sont en réparation), mais sans l'ombre des croix, les lycéens bronzent volontiers...
Nous contournons ce qui fut le palais de justice, montons vers les anciennes prisons qui dominaient la plaine du Forez et où résonnent aujourd'hui flûtes et piano, avant de redescendre vers le centre.
Claude arpente, commente, désigne, pousse les portes, gravit les marches du temps. Parfois le passé se cache derrière un nouveau digicode, il faut sonner chez l'habitant, se pencher depuis les balconnets 95 C d'une boutique de lingerie pour accéder à une cour intérieure du XVIème, traverser des rayons de prêt à porter ou un l'accueil d'un centre de massage pour découvrir un superbe escalier à vis.
Passage Saint-Anne, il est question d'un bourreau assassiné et d'un boulanger aliéné devenu instituteur, je range l'anecdote dans mon sac à idées ; dans mon prochain roman, il est justement question d'une boulangerie. Arrêt devant la maison natale de Victor de Laprade, je salue... une vieille connaissance.
Impossible de retranscrire là tout le voyage, les trésors de Claude sont à la mesure de sa passion contagieuse, foisonnants, les récits s'entrecroisent, hommes et bâtiments, politiques ou artisans, pensées et pierres, rues-mystères, demeures prospères ou angles amers où se sont tramées révolutions et guerres de religions.

Une photo qui résume à elle seule tout le synchrétisme de cette étrange petite ville... Entre hier et now !, rue Saint-Pierre, une façade aux arc d'ogives rebouchés, avec des pierres de réemploi.
Le Chemin du Forez nous mène jusqu'au pied du Vizézy et l'ancien hôpital.
Hop, Claude m'offre ensuite un saut magique au XIIIème siècle, dans la salle héraldique de la Diana, devenue musée et centre de recherches historiques et archéologiques du Forez, l'un des lieux les plus célèbres de Montbrison. Je l'avais découverte en 2007 lors de mon précédent passage à la Fête du Livre, mais là, la lumière est sublime. Cent quarante-huit blasons répétés chacun trente-six fois ornent la voûte en ogive, exceptionnellement conservée. Je bave devant la bibliothèque...
En ressortant de la Diana, je découvre avec étonnement une clef de voûte, posée sur le sol. Moi qui n'en ai jamais vu qu'en levant le nez au ciel, je suis impressionnée par sa taille. Une p'tite pensée pour mon ami Jean-Michel, auteur-architecte - aussi dans l'aventure blue Cerises - ; à ses côtés, j'ai appris peu à peu à bâtir une histoire comme un édifice. Fondations, murs, charpente, toiture, ouvertures...
Pour découvrir une clef de voûte dans son contexte, Claude m'emmène faire un tour dans la nef de la collégiale Notre-Dame d'Espérance, à deux pas de la Diana.
Nous terminons par un petit tour jusqu'au portail de l'ancienne caserne de Vaux.
Reste pour moi à trouver un autre portail. Celui qui ouvre sur mon histoire en cours...


Mercredi, une autre visite.
Une petite princesse en pdf...
Mon éditrice au Sorbier m'envoie la maquette du prochain album de La photo de classe (La princesse au grain de riz, le quatrième de la collection, en librairie le 14 mai prochain) que j'ai écrit, et illustré par Frédéric Rébéna. J'avais suivi pas à pas tous les crayonnés, mais il reste toujours la magie de la découverte en couleurs (et celles de Frédéric sont de vrais feux d'artifice), cet instant où les personnages, comme des comédiens au soir d'une première, sont tout à coup sur scène, face au public...

samedi 13 mars 2010

Cherche trampoline magique


Parfois, grignoter des bretzels ne suffit pas à chatouiller l'inspiration. Aujourd'hui, je patine sec sur un texte.

Quand les mots savonnent, mon imaginaire cherche souvent une issue dans la densité d'une image.

J'ai très peu de livres sous la main, je n'ai emporté que le strict minimum dans la résidence. On est samedi, mais je n'ai pas le courage de crapahuter jusqu'à la bibliothèque municipale.
Je tourne.
Voyons, des images, j'en ai. Des fraîches, même.

J'ai étalé devant moi les derniers dessins des enfants de l'école du Chemin Rouge.
La série d'études qui illustrent le passage " Xibulon part à la poursuite de sa tête". Beaucoup de trouvailles. Mais l'un d'entre eux retient particulièrement mon attention :Xibulon, grimpé sur un trampoline, bras levés au ciel, propulsé à l'assaut du soleil-tête comme à l'assaut d'une idée. Troublante métaphore poétique de la quête du créateur... Les enfants ont souvent une déconcertante aisance synthétique.

Moi aussi, je veux un trampoline magique !

vendredi 12 mars 2010

Attention Chantier

Matinée orange au Chemin Rouge.
Xibulon est couleur abricot, c'est décidé.

D'abord un petit temps d'écriture individuelle
de la fin du texte.

et puis...

Caillou, papier, ciseaux,
j'ai endossé le rôle de chef de chantier.

Caillou, papier, ciseaux,
les enfants ont dessiné, corrigé, découpé.

Caillou, papier, ciseaux,
les couleurs, on a tricoté.

Caillou, papier, ciseaux,
de table en table avec Catherine on a virevolté
(à 2000 Volts)

Caillou, papier, ciseaux,
la voix je me suis éraillée.

Caillou, papier, ciseaux,
le puzzle de l'histoire on a avancé.

Caillou, papier, ciseaux,
mardi prochain, on va continuer.

Caillou, papier, ciseaux,
bientôt un autre chantier : pâte à modeler !


Comme pour le conte à Moingt, depuis quelques jours, le chemin de fer de l'album est affiché sur le mur de la classe afin que les enfants aient en tête le découpage et le rapport texte/images. Un 36 pages classique, 15 planches couleurs. Cette mise à plat permet d'avoir une bonne vue d'ensemble des diverses couleurs utilisées pour les papiers découpés d'une illustration à l'autre ; ainsi, les réajustements (les corrections de répétitions ou de juxtapositions chromatiques hasardeuses), les harmonies, les effets de correspondances, les passerelles sont visibles.

jeudi 11 mars 2010

Et si Marcel préférait les bretzels ?

Que faire quand les idées s'essoufflent ?
Désormais, je saurai quoi répondre : croquez un bretzel !

Quand j'arrive dans la classe cet après-midi,
il est question de guerres d'olives et de deux clans.
D'olives vertes qui oppressent des olives noires...

Comme la pizza a besoin de piment,
coup de vent dans les mots,
aujourd'hui Bertrand a prévu grand, des bretzels de géants,
il faut ce qui faut pour faire avancer le scénario.

Très vite, l'imagination part au galop.
Le coup du bretzel couteau-suisse, vous connaissez ?

des bretzels-lunettes

des bretzels-auréoles

L'idée d'un clan opprimé fait son chemin...

...des bretzels-menottes.

Alors, vous avez compris où se nichait le Paradis des idées ?
Et bien oui, dans des mots-chapeaux,
des mots-feux d'artifices, des mots-silex,
d'où jaillissent en chaînes des nuages-images.
Qui eût cru que tant d'histoires se cachaient
dans un simple gâteau au sel ?

Les madeleines, c'est fini Marcel.
Maintenant, on passe au bretzel.


Le mot du jour :

Les discussions animées autour du scénario sont nombreuses avec les enfants. Je joue souvent les trouble-fêtes, les taquine, les pousse dans leurs retranchement, les invite à réfléchir sur des incohérences, ou des facilités dans le récit. Le plus difficile à mettre en place dans un conte conçu collectivement est la recherche d'une ligne de force et d'une chronologie qui ménagent du suspens. La construction fragmentaire du récit, en puzzle, ne facilite pas toujours la tâche. D'une séance à l'autre, il n'est pas rare que je leur fasse détricoter des mailles pour en retricoter d'autres. La plupart les élèves prennent ces innombrables modifications avec flegme, certains s'agacent parfois mes interventions, d'autres enfin réagissent avec détachement et humour. Jusqu'à me prendre à mon propre piège...
C'est ce qui arrive aujourd'hui, quand je questionne :
"Mais pourquoi avez-vous choisi d'appeler aussi vos livreurs de pizza Bretzel et Bretzelle, alors qu'il déjà question d'un bretzel dans l'histoire ?"
"Ben pour faire diversion !" me répond un élève en haussant les épaules dans un sourire malicieux.

lundi 8 mars 2010

Le temps interdit

Les Trois Ages de la femme, Gustav Klimt, 1905.

Extrait du roman... en cours de résidence.

"Tu vois, Giulia, là où tu es née, les petites filles vont à l’école, les femmes ont le droit de vote et sont à peu près libres de mener la vie qu’elles souhaitent. Elles peuvent devenir Prix Nobel, conduire un bus, diriger un chantier. Elles peuvent choisir ou non d’avoir des enfants et décider de ne pas se marier. Elles portent le jean ou la robe, le short ou le bikini et on pourrait croire qu’elles disposent de leur corps à leur guise, mais il y a une chose que notre société leur refuse obstinément : elles n’ont pas le droit de vieillir. Avoir des rides, des seins fatigués, des jambes froissées est interdit. C'est même devenu presque illégal."
J'ai raconté ça à Chaya. Elle a haussé les épaules et m'a dit :
"Dans mon pays, c'est presque illégal d'être une femme."

jeudi 4 mars 2010

Le test de Rorschach...orizo

Que voyez-vous dans cette tache ?

Un éléphant dans un boa ?
Un chapeau-claque tombé dans une flaque de boue ?
Un ovni désintégré ?

Car ce matin, un ovni a atterri dans le conte.
Ou plutôt : sur un rochers-olives, au milieu de fougères-oignons, le long d'un chemin de gruyère serpentant dans une forêt ombrée de tomates. Oui. Vous voilà transportés dans le monde croustiffrayant de la pizza. Aujourd'hui, les CMoingt s'y sont joyeusement égarés avec Melkar et Rosaline.
Alors, comme le Petit Poucet, on a semé des noyaux d'olives, pour s'y retrouver. Et pour être vraiment sûrs de garder le cap, on a tracé notre itinéraire de mots sur une grande feuille blanche, scotchée sur le tableau. Une carte Michelin. Enfin, une carte Micheloingt, quoi.

mercredi 3 mars 2010

L'instant t (2)

Entre essai et poésie. Comment les personnages, golems de sens et de chair textuelle sortent des limbes, s'extraient de leur gangue, et poussent la porte intime de l'imaginaire de l'écrivain.

Extrait :

« Un jour, ils sont là. Un jour, sans aucun souci de l’heure. On ne sait pas d’où ils viennent, ni pourquoi ni comment ils sont entrés. Ils entrent toujours ainsi, à l’improviste et par effraction. Et cela sans faire de bruit, sans dégâts apparents. Ils ont une stupéfiante discrétion de passe-muraille.

Ils : les personnages.

On ignore tout d’eux, mais d’emblée on sent qu’ils vont durablement imposer leur présence. Et on aura beau feindre n’avoir rien remarqué, tenter de les décourager en les négligeant, voire en se moquant d’eux, ils resteront là.
Là, en nous, derrière l’os du front, ainsi qu’une peinture rupestre au fond d’une grotte, nimbée d’obscurité. Une peinture en grisaille, mais bientôt obsédante.
Là, à la frontière entre le rêve et la veille, au seuil de la conscience. Et ils brouillent cette mince frontière, la traversent continuellement avec l’agilité d’un contrebandier, la déplaçant, la distordant.
Là, plantés sur ce seuil mouvant avec la violence immobile et mutique d’un mendiant qui a jeté sur vous son dévolu et qui ne partira pas avant d’avoir obtenu ce qu’il veut. »
Sylvie Germain.


Sujet qui résonne d'autant plus en moi que je viens de l'aborder dans un texte d'album, illustré par Jean-Michel Payet (l'un des mes joyeux complices des Blue Cerises) et qui paraîtra dans quelques mois aux éditions Milan :
M. Adam, ou comment naissent les histoires.

Le syndrome de Xibulon

étude à partir de découpages
des élèves de l'école du Chemin Rouge

Le syndrome de Xibulon, l'écrivain le connaît bien, côté tête, il passe sa vie dans une cabine d'essayage.
Mot après mot, phrase après phrase, l'auteur change d'yeux, de nez, de lèvres et papilles, de perruque. De rêves, de cauchemars, de souvenirs aussi. Il s'essaye devant le miroir, il minaude, tâte les rides, rajuste une paupière affaissée.
Rêve-t-il d'une bouche XXL ? D'oreilles 36 fillette ? De sourcils en dentelles ? Qu'à cela ne tienne, il lui suffit de passer le rideau de son clavier ou le paravent de la feuille, pour s'offrir une nouvelle mise en plis, ou plutôt, une nouvelle mise en mots. Et si la phrase le boudine, il n'a qu'un geste à faire : une dernière touche à presser, "suppr".

mardi 2 mars 2010

Retour swing

Première séance de reprise, jour de rentrée.
Les élèves sont encore un peu engourdis, nos oreilles aussi, alors on les réveille.
Avec une relecture du conte en cours.
Avec des questions.
Des questions qui swinguent.
...voilà qu'une musicienne débarque dans l'histoire,
et chatouille l'esprit éteint de Xibulon.

Bon, mais est-ce vraiment une guitariste ?

Peut-être une saxophoniste ?

Ou une pianiste ?

Le coeur balance encore...

On jette un oeil du côté du Paradis des idées.
On trouve une idée cachée sous une pierre,
cachée sous une fleur
et même une idée camouflée dans la lumière.

Je vous l'ai dit :
ça swingue.